jeudi 30 mai 2013

Le plaisir de lecture est sur papier

(MàR#172)


La lecture d’informations sur Internet est une pratique qui concerne la quasi totalité des connectés. Mais, entre le support imprimé et les différents écrans, deux lecteurs de magazines sur trois privilégient le premier. Cette préférence est un atout à ne surtout pas négliger.


Selon la 3ème édition du volet français de l’étude Deloitte « State of the Media Democracy », 74% des Français préfèrent lire des magazines en version papier, même si la plupart des informations qu’ils contiennent sont accessibles en ligne.

Cette préférence de 2 Français sur 3 pour l’imprimé par rapport aux différents écrans ne s’explique que très partiellement par l’âge des répondants. En effet, si pour les 47 ans et plus, ce chiffre passe à 77%, il est tout de même de 70% chez les 24-29 ans réputés plus technophiles, et de 66% chez les 14-23 ans qui sont nés et ont grandi au milieu des écrans.

Cet attachement aux supports imprimés est tout aussi forte chez les plus petits, comme l’indiquent les résultats d’une enquête réalisée par le groupe PlayBac ( « Mon quotidien », « Le petit quotidien », « L’actu », etc) auprès de 100.000 de ses abonnés : 85% des 9-16 ans ne souhaitent pas remplacer leur journal papier par un exemplaire numérique et 47% ne veulent même pas recevoir la version numérique en complément de leur journal papier !

Pour analyser correctement ces chiffres surprenants, il faut tout d’abord bien différencier « consommation » et « préférence ».

La consommation d’information en ligne concerne désormais la quasi totalité des connectés, qu’elle se fasse via les différents portails, les moteurs de recherche, les sites de médias ou les réseaux sociaux. Face à cette concurrence, qui non seulement ne disparaitra pas mais ira en s’amplifiant, la presse imprimée n’est forte que de la préférence qui lui est accordée. Mais cette « côte d’amour » est très importante, si l’on considère que la préférence augmente la « valeur perçue » et conditionne la fidélité.

Il existe deux explications possibles pour cette préférence accordée aux supports imprimés.

  • La première est la capacité qu’ont les éditeurs de magazines à travailler « la forme du fond » en utilisant les différentes écritures journalistiques, la typographie, l’illustration et la maquette pour optimiser l’accès à l’information, créer des surprises et, finalement, augmenter l’utilité de lecture tout en la doublant d’une lecture plaisir. Face aux supports imprimés, cette prise en compte de l’importance de la forme est faible sur les sites de médias et la plupart des applications pour smartphones qui privilégient l’utilité. Mais elle est totale avec les applications pour tablettes et, bien sûr, les versions numériques des magazines qui en transposent les atouts sur écran en les enrichissant de fonctionnalités Web 2.0.

  • La seconde explication tient à la nature même du support papier qui crée une relation physique et polysensuelle avec les marques média, et qui est difficilement remplaçable pour les titres très affinitaires qui proposent des informations à centres d’intérêt ciblés comme pour ceux qui ont une fonction de découverte ou de distraction. Les enfants n’ont pas fini de guetter le facteur et les adultes de roder autour des kiosques …

jeudi 23 mai 2013

Facebook ou Twitter ?

(MàR#171)


La puissance des réseaux sociaux ne peut plus être ignorée des marques en quête d’influence, de proximité et de nouveaux clients. Mais les profils et les comportements des titulaires de comptes diffèrent fortement selon les réseaux sociaux et les marques doivent en tenir compte avant de décider sur lequel s’impliquer le plus fortement.

Selon Nielsen, Facebook compte dans notre pays 26 millions de membres actifs (au moins une connexion mensuelle) dont 63% qui consultent le site tous les jours. Chaque membre du réseau passe en moyenne 5h18 par mois sur le site contre 1h36 seulement sur Google et, sur la même période, visite 559 pages contre 235 pour Google. Et Facebook n’est pas le seul réseau social …

Pour les marques, la question n’est donc plus d’être ou de ne pas être sur les réseaux sociaux, mais de savoir sur lesquels, pourquoi et comment. Une récente étude internationale d’Exact Target apporte quelques éléments de réponse.


A tout seigneur, tout honneur, commençons par Facebook.

43% des Français suivent au moins une marque sur ce réseau social, ce qui est mieux que les Allemands (39%), mais moins bien que les Brésiliens (77%), les Australiens (55%) et les Britanniques (45%), ce qui peut indiquer que ce nombre peut encore croitre.

En France, la première attente à l’égard des marques suivies sur Facebook est de pouvoir bénéficier de réductions (29%), quasiment à égalité avec les informations sur la vie de la marque et ses produits.

Face à ces attentes, les différents acteurs présents sur le réseau ne se battent pas à armes égales. Ainsi, les marques médias, dont les productions changent avec chaque parution, n’ont aucune difficulté à renouveler leurs discours ; en revanche, elles disposent de beaucoup moins de latitude pour proposer des réductions et des cadeaux qui changent en permanence. Or, elles vont devoir faire de vrais efforts d’imagination si l’on prend en compte l’importance des attentes de cadeaux et de promotions en Australie (52% et 46%), au Brésil (47% et 51%) ou au Royaume Uni (48% et 49%) !


Qu’en est-il pour Twitter ?

La notoriété de Twitter est très importante depuis que ceux qui font l’actualité dans tous les domaines ont pris l’habitude de remplacer leurs réactions auprès de l’AFP et les communiqués de presse par des gazouillis de 140 caractères. Mais, si 89% des Français connaissent le site de micro-blogging, 5% seulement y ont ouvert un compte. La puissance directe de Twitter est donc faible et son influence dépend avant tout de la qualité des « twittos », de l’intérêt des messages qu’ils postent et de la bonne volonté des médias pour s’en faire l’écho.

Les attentes des utilisateurs à l’égard de Twitter diffèrent fortement de ce que l’on constate pour Facebook. Les 4% de Français qui suivent au moins une marque sur ce réseau, en attendent avant tout de l’information sur l’entreprise et ses produits et non des réductions ou avantages. Dans les 4 autres pays étudiés par Exact Target, la tendance est identique et indique que Twitter est plus facilement utilisable par les marques qui produisent des contenus renouvelables, visent des publics plus ciblés et sont moins à l’aise que d’autres pour déployer des panoplies de promotions.
C’est, bien sûr, le cas des « marques médias ».

jeudi 16 mai 2013

Les Consumer Magazine ont-ils encore un avenir ?

(MàR#170)


L’annonce par le groupe Canal + de l’arrêt des versions papier de ses magazines « Canalsat le mag » et « Plus » (6 millions d’exemplaires par parution à eux deux !) ne marque pas le début de la fin des magazines de marque, mais signifie qu’ils doivent redéfinir leurs fonctions à l’heure d’Internet.

Comme le souligne un intéressant dossier de presseedition.fr, les magazines que les entreprises éditent pour les consommateurs n’ont pas attendu pour exister que soit théorisé le concept de « contenu de marque ». C’est en effet en 1930 que le groupe de distribution américain Woolworth a imprimé à plus de 5,3 millions d’exemplaires le premier numéro du magazine qu’il destinait à ses clients.

Pourtant, 83 ans n’ont pas suffi pour définir précisément ce qu’est un magazine de marque. Est-ce un outil de conquête tourné vers les prospects ou un des moyens de la fidélisation des clients acquis ? A-t-il pour fonction de faire vendre plus, d’enrichir la relation client ou de faire évoluer l’image et le territoire de la marque ? Est-on dans la publi-information ou dans le journalisme appliqué aux univers dans lesquels se consomment les marques éditrices ? Le consumer magazine se définit-il par sa gratuité, par un accès réservé à certains clients seulement, par le fait qu’il est ou non aussi un support publicitaire ? Les publications des collectivités locales et celles que de nombreux éditeurs de presse professionnelle conçoivent, régissent et diffusent pour le compte d’organisations des secteurs sur lesquels ils interviennent sont-ils des consumer magazines ? L’avenir de ces supports est-il sur les différents écrans ou toujours sur le papier ?

A la plupart de ces questions, on ne peut apporter que des réponses de normand. Cependant, la disparition annoncée de deux mastodontes du secteur permet de clarifier un peu les choses.

> Première réflexion : à l’heure du multi-écran, du temps réel et alors que les bases de données permettent de cibler les consommateurs en fonction de ce qui les différencient, il n’est plus indispensable d’éditer des magazines qui se résument à des catalogues d’offres de programmes ou de produits.

> Deuxième réflexion : lorsque « l’information service » est partout et en accès gratuit via Internet, il devient contre productif de la réserver aux seuls clients fidèles et de ne la proposer que sur papier.

> Troisième réflexion : le consumer magazine ne doit plus être considéré comme un « couteau suisse » qui permet de faire de la notoriété, de l’image, du trafic, de la promotion, etc, car il remplit moins bien certaines fonctions que les outils et techniques spécialisés.

> Quatrième réflexion : le média de marque est, plus que jamais, fort de ce qu’il a en commun avec les « médias éditeurs » : des contenus à valeur ajoutée, une forte dimension affinitaire, une vraie capacité à faire vivre des univers communs aux marques et aux consommateurs et à proposer des bonnes surprises (la « sérendipité », cf Matière à Réflexion #77).

> Cinquième réflexion : les marques ne peuvent plus ignorer les écrans pour leurs médias, et notamment ceux des tablettes qui prolongent le papier. Mais elles doivent aussi se souvenir que le papier demeure le plus souvent incontournable car il rend « physique » la relation entre la marque et le lecteur, il suscite une lecture plus profonde, l’information qu’il propose est jugée plus crédible et il a de nombreux lecteurs au-delà de ses destinataires.

jeudi 2 mai 2013

Les nouveaux chemins de la fidélité

(MàR#169)


Lorsque la conquête de nouveaux clients s’avère plus difficile, on découvre également souvent que les clients fidèles dont on s’occupait si peu (puisqu’ils étaient fidèles !) ont eux aussi commencé à regarder ailleurs.
Comment renouer le lien ?

La saint Fidèle (24 avril) est largement moins célébrée que la saint Valentin, ce qui illustre bien le faible intérêt que l’on accorde à ce qui est considéré comme acquis par rapport à se qui se conquiert.  Elle donne cependant lieu depuis quelques années à un « Baromètre de la fidélité » dont les résultats donnent à réfléchir.

Côté vie privée, tout semble aller pour le mieux, les Français interrogés se déclarant plus fidèles qu’avant à leurs conjoints et amis.

C’est côté business que les choses commencent à se gâter. Certes, 67% des Français se déclarent fidèles aux marques, sans changement depuis 2009. Mais ils ne sont plus que 53% à considérer que cette fidélité est récompensée, ce qui correspond à une baisse de 4% en 4 ans. Bien que limitée, cette baisse doit être prise en compte pour au moins 3 raisons : elle est régulière ; elle va à l’encontre d’un intérêt croissant pour l’abonnement qui est une des manifestations de la fidélité (cf « Matière à réflexion » # 163) ; enfin, ses causes ne sont pas celles que l’on pense.

En effet, l’édition 2013 du Baromètre de la fidélité nous indique que les Français sont de moins en moins nombreux à considérer que la récompense de leur fidélité passe par des avantages financiers, promotions et autres « bons plans ». Ainsi, chaque consommateur détient en moyenne 6 à 7 cartes de fidélité, mais 35% seulement d’entre eux (- 8% en un an !) en utilisent les avantages. Pour 2 clients sur 3, la carte de fidélité est devenue un outil de commodité parmi d’autres et n’est pas (ou plus) un moyen d’être reconnu par la marque ou l’enseigne. Et la technologie ne change rien à l’affaire : parmi les 27% de Français qui accèdent déjà à un programme de fidélisation sur mobile, 2 sur 3 considèrent qu’il ne permet pas aux enseignes de mieux les connaître et ne crée pas une relation privilégiée avec la marque.

La nouvelle clé de la fidélisation est donc la considération, qui doit, bien sûr, toujours s’exprimer par des avantages, mais aussi - et de plus en plus - par du dialogue, des petites attentions non marchandes et la prise en considération de ce qui va au-delà de la simple relation client/fournisseur. C’est cette approche à la fois globale et personnalisée qui explique l’augmentation de la fidélité des Français à l’égard de leurs supermarchés de proximité ou de leurs coiffeurs ...

La fidélité à un journal ou un magazine n’a pas été étudiée par le Baromètre de la fidélité. Tant mieux pour leurs éditeurs qui seraient vraisemblablement apparus comme les derniers de la classe, car ils ne s’adressent généralement à leurs clients qu’une fois par an, pour leur demander de se réabonner à un tarif toujours supérieur à celui qu’ils réservent aux nouveaux venus !

Il est temps de retrouver le bon chemin : sur la planète marketing comme dans le 10ème arrondissement de Paris, c’est la rue de la Fidélité qui conduit à la rue du Paradis !